Ça faisait au moins 3 ans que j’en parlais : motivée par une circonstance additionnelle, je suis allée suivre mon cours de secourisme et réanimation cardio-respiratoire (RCR). Ça durait deux jours – j’en sors ce soir, un cahier Canada rempli jusqu’au 3/4. (Toutes les photos de cet article sont de Stéphane Bourgeois. Elles sont tirées de la pièce Roméo et Juliette au Théâtre du Trident, pour laquelle j’ai conçu les maquillages en 2019.)
Notre formateur, Martin, s’est présenté : ambulancier pendant 20 ans, il allait nous présenter le programme de la Croix Rouge pour que nous sachions quoi faire pour tout genre d’urgence. En ajoutant tout de suite :
« Vous le constaterez très vite, j’ai un gros déficit de l’attention, je vais souvent être distrait, sauter à quelque chose et revenir. Vous pourrez me le dire ‘Eille, j’ai une question’ ou ‘J’ai besoin que tu reviennes là-dessus’, c’est parfait. Je vais vous montrer parfois des contenus supplémentaires, je vais passer d’un Powerpoint à l’autre, on va tout couvrir par contre c’est sûr. Mais je suis ben facile à distraire. Vous pourrez écrire médiocre dans l’évaluation de la fin pour la gestion de classe, ce sera mérité! »
On était avertis.
Une formation importante
En 14 heures, on a couvert toutes les urgences médicales : arrêt respiratoire, crise d’hypoglycémie, convulsions, empoisonnements, brûlures, chocs thermiques, etc. J’ai pensé à ma soeur qui a découvert sa fragilité épileptique à près de 40 ans, mes deux autres qui se sont retrouvées en auto perte totale après une collision avec un chevreuil, mon père qui a failli perdre son pouce dans un accident de scie mécanique. Je pouvais déjà lier ce que j’apprenais à des situations réelles.
Nous avons regardé quelques vidéos, rien de gore mais du très vrai, des vidéos de cellulaire : une joueuse de volley-ball qui fait un arrêt respiratoire, une personne qui se casse une jambe en cascade de BMX, un joueur de soccer qui convulse après un mauvais coup de tête. On voit l’amorce de tels vidéos dans les compilations ‘Fails’. On les observe très différemment quand on les ouvre dans un cours de premiers soins.
Le point en commun de tous les événements traumatiques est la présence d’humains. Comme je ne peux pas pratiquer mon métier en l’absence d’humains, mon choix de carrière me rend encore plus susceptible de porter secours à quelqu’un au cours de ma vie. Bien qu’il soit impossible de prévoir ma réaction, je crois que de me faire présenter, pour une première fois, la possibilité d’être confrontée à ce genre d’événement m’y prépare.
‘Billie Jean is not my lover…’
Nous avons bien sûr pratiqué le massage cardiaque. Le but de la réanimation cardio-respiratoire n’est pas de faire « repartir » le cœur, mais bien de le pomper à sa place en attente des ambulanciers. Ce n’est pas bien compliqué. Il suffit de presser à deux mains sur le cœur 30 fois, puis si on le souhaite d’insuffler deux fois dans la bouche en pinçant le nez de la tête légèrement basculée vers l’arrière, puis de recommencer.
Nous l’avons pratiqué, non pas sur Staying Alive, mais sur Billie Jean. Pourquoi? Un bon massage cardiaque compte entre 100 et 120 battements par minute. Comme Staying Alive a un BPM de 100, il suffit de ralentir à peine pour causer des dommages à la victime. Avec Billie Jean, au BPM de 110, on peut aller un petit peu plus vite ou plus lentement sans risque. Une fois cela expliqué, notre formateur a ajouté :
« Et aussi, parce que Staying Alive, je suis écoeuré de l’entendre. »
ÉpiPen
Pour moi qui pose toujours la question : avez-vous des allergies? (pour éviter les réactions cutanées à certains ingrédients), je sais maintenant me servir d’un Épipen. On a fait le mouvement avec un injecteur de pratique sur le côté externe de la cuisse : clic! 1..2…3…. On masse, car l’épinéphrine (ÉpiPen : crayon d’épinéphrine, ou auto-injecteur d’adrénaline) est un liquide assez épais. Il n’y a pas de risque à utiliser un ÉpiPen sur une personne non allergique : son effet sera dissipé en quelques minutes.
Martin a demandé à voir comment nous tenions l’Épipen dans la main : en me voyant, il a dit ‘ah ben, j’espérais voir ça!’ Je pensais bien le tenir, mais au contraire : on ne garde jamais son pouce sur le dessus, car il arrive qu’on se trompe de côté dans la nervosité, et alors, on s’injecte le produit dans le pouce (en créant de nouvelles complications). Je vais m’en souvenir.